Prenons les requérants d’asile et les étrangers dans notre giron
Le monde est en train de vivre la plus importante migration forcée de personnes en fuite depuis la Deuxième Guerre mondiale. Il s’agit de plus de 59 millions de réfugiés: hommes, femmes, personnes âgées, enfants et nouveaux nés se trouvant contraints de quitter leur patrie pour protéger leur vie et leur famille de la guerre, de la violence et des persécutions. La manière dont nous parlons de ces êtres dans notre pays (et ailleurs), la manière dont les problématiques «réfugiés, asile et immigration» sont devenu tout bonnement un thème prioritaire de campagne pour les votations fédérales d’automne, la manière dont il est fait de la misère des uns des profits politiques pour d’autres sont franchement honteuses et indignes de notre société.
Cette problématique est actuellement exploitée par les partis du centre et de droite en Suisse. Même l’électorat social-démocrate suggère de soutenir les propositions qui exigent un durcissement de la politique d’asile et des limitations supplémentaires pour les immigrés requérants d’asile en Suisse. De telles revendications politiques s’accompagnent de plus en plus d’une rhétorique qui révèle la mesquinerie grandissante et le manque d’empathie d’une partie de la population et se conclut bien trop souvent par des remarques racistes qui dédaignent l’être humain. Et avec ça, dans beaucoup de médias, la Suisse est dépeinte comme un pays envahi par des réfugiés. Le Club de la télévision suisse donnait à son émission du 4 août le titre suivant: Menace «réfugiés». Dans beaucoup d’articles de journaux, on met en garde contre des «vagues de réfugiés», et sur les médias sociaux on se défoule sans honte et sans retenue contre les requérants d’asile et les étrangers. Les limites, même légales, sont bien souvent franchies, tandis que les encouragements à la haine raciale et les appels à la violence augmentent sur internet.
Les faits, dans un climat aussi émotionnellement chargé, peinent à se faire entendre. Ainsi le Secrétariat d’Etat aux migrations et les organisations d’aide aux réfugiés ont beau continuer de répéter que moins de 20% des 59 millions d’immigrés arrivent dans les pays occidentaux, que le nombre de requérants d’asile est bas en Suisse par rapport à nos voisins européens et que nous avions accueilli beaucoup plus de réfugiés dans les années 1990 (guerre des Balkans) qu’à présent: face aux citoyens en colère et à leurs émotions, face aux campagnes politiques de dénigrement incendiaires, ces faits ne font pas le poids. Qu’avonsnous donc? Pourquoi voyons-nous ceux qui cherchent notre protection uniquement comme des «problèmes», des «menaces» ou des «parasites» de notre système social? Avons-nous perdu toute empathie, compassion et tout sens de solidarité? Où est passée notre tradition humanitaire à laquelle nous faisons si souvent référence en Suisse? Où est passé notre humanité?
Le droit à l’asile fait partie des droit de l’homme. Accorder notre soutien à ceux qui demandent de l’aide et respecter à leur égard les lois de l’hospitalité sont aussi d’importantes valeurs religieuses. Le traitement des étrangers et des réfugiés est un thème important dans le judaïsme, le christianisme et l’islam, et prodiguer soin et protection à l’étranger est un devoir dans ces trois religions. Le traitement des étrangers et des réfugiés est, dans la Bible, un critère de référence qui permet de jauger l’ampleur des droits et de la justice dans une société. Dans la Torah, la protection toute particulière des étrangers est fondée sur l’expérience d’Israël lui-même à l’étranger. L’amour du prochain dans le Nouveau Testament ne s’adresse pas seulement à ceux qui nous sont proches mais également aux étrangers, et suivre Jésus c’est aussi s’occuper des plus faibles dans la société. Le devoir d’aider ceux qui
demandent de l’aide, de soutenir les nécessiteux, de protéger les persécutés et de partager les biens confiés avec solidarité est tout autant profondément ancré dans la tradition islamique.
Nos religions nous enseignent la solidarité, la compassion, la générosité et la serviabilité. En tant que membres d’une communauté religieuse, nous devons tout particulièrement prendre parti pour les réfugiés qui ont fui vers notre pays et ont besoin de notre protection. Qu’on ne nous prive pas de notre compassion et humanité ! Sans quoi, nous ne poussons pas seulement des êtres dans la misère et la souffrance, mais nous nous dégradons ousmêmes, notre humanité et les fondements éthiques de notre société. Beaucoup d’hommeset de femmes dans notre pays ont reconnu cela et élèvent de plus en plus leur voix contre l’appel à la haine et la diffamation de ceux qui ont besoin de protection. Mêmes les actions solidaires et aides actives augmentent dans beaucoup d’endroits, ce qui ne fait presque jamais la une dans les médias : individus, groupes et aussi mouvements politiques prennent en charge des réfugiés, leur prodiguent nourriture et habits, leur offrent un toit et établissent des contacts sociaux. Inspirons-nous de ces exemples et prenons dans notre giron ceux qui ont besoin de protection et les étrangers.
Bâle, 19 août 2015
© Interreligiöser Think-Tank, 19 août 2015 / Prenons en charge les personnes en quête de protection et les étrangers – en PDF.
© Interreligiöser Think-Tank, 19. August 2015 / Lasst uns Schutzsuchende und Fremde in Obhut nehmen – als PDF.